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Un arsenal de propagande. Episode 1.

En République Démocratique d’Allemagne (RDA) : Un arsenal de propagande.

Episode 1.

 

Synthèse : Jacques Suspène

 

 

Avant-propos :

 

Cet article reprend beaucoup d’éléments d’un bulletin « Propousk » interne à l’AAMMFL (Amicale des Anciens de la MMFL) consacré à la propagande en RDA et/ou figurant, avec son aimable autorisation, dans le livre du Général MANIFICAT « Propousk ! » publié aux Editions LAVAUZELLE. Immense merci aux Généraux Jean-Paul HUET et Patrick MANIFICAT pour leurs écrits.

 

« Lorsqu’un gouvernement se prépare à la guerre, il décrit ses adversaires comme des monstres »

Carl Sagan.

 

 

Propagande et DDR…

 

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Dans son Introduction du bulletin interne à l’AAMMFL consacré à ce thème  de la propagande en RDA, le  Général Jean-Paul HUET écrit :

« Ce bulletin, est consacré à la propagande idéologique telle qu’un observateur de la MMFL pouvait la percevoir en parcourant les villes et la campagne de l’Allemagne de l’Est. Il présente un condensé de l’arsenal de propagande qui environnait le missionnaire jusqu’à il y a trente-cinq ans. Aujourd’hui, le dessin amuse, la phraséologie fait sourire, mais ce sont bien ces slogans qui ont conditionné toute une population, son armée et celle du « grand frère d’armes » pendant plusieurs dizaines d’années.

 

   Le général Patrick MANIFICAT, a su avec son talent connu, et reconnu, décrire et les différentes facettes visibles de ce phénomène propre aux régimes dictatoriaux, fondés sur une idéologie totalitaire qui méprise la personne humaine et qui croit en la force du conditionnement des esprits par des méthodes psychologiques « mécanistes ».

 

 Puis dans ce bulletin, le Général MANIFICAT poursuit :  

 

« Les procédés de la propagande pratiquée en RDA, comme la répétition à l’infini de stéréotypes, la simplification outrancière, le glissement sémantique, l’inversion des valeurs, l’appel aux mots vertueux comme l’amour de la paix, et naturellement l’incitation à la haine et à la peur de l’autre en face, n’ont rien d’original car ils étaient directement issus de ceux de « l’agitprop », mis au point par le « grand frère » soviétique.

 

Mais ces méthodes ont été à tous égards comparables à celles de la propagande politique mise en œuvre par les dirigeants du IIIème Reich, telle que Serge Tchakhotine l’a remarquablement analysée au début des années 30 dans son livre de référence « Le viol des foules par la propagande politique ». Ainsi la boucle était bouclée, et les malheureux citoyens de cette partie de l’Allemagne ont été soumis pendant plus de 60 ans aux mêmes procédés de  matraquage idéologique, d’abord pour une plus grande nation et une race aryenne supérieure, puis alternativement et sans transition, pour un plus grand parti et une classe sociale supérieure. La RDA ne se présentait-elle pas comme le premier Etat des ouvriers et paysans en terre allemande, selon une terminologie bien proche de celle des nazis exaltant force et beauté : « DDR ist jung, schön und stark ! » (La RDA est jeune, belle et  forte).

 

Mais le souvenir de cette propagande ne laisse-t-il pas un irrépressible sentiment d’ennui que cette grisaille intellectuelle engendrait, et de tristesse pour ceux qui la subissaient dans tous les moments de leur vie quotidienne ?

 

Cependant personne n’était dupe. En témoigne l’humour des Berlinois et autres Saxons, merveilleux antidote contre cet embrigadement des esprits. A cet égard on ne saurait non plus ignorer le rôle majeur joué par les radios et télévisions occidentales qui pouvaient être captées dans une partie du territoire de l’Allemagne de l’Est. 

 

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(La tour TV de Berlin-Est, outil important  de la propagande)

         (Mais ironie de l’histoire, quand le soleil frappait la boule de la Tour , se dessinait une belle croix…)

 

 

Malgré l’impulsion donnée par une partie de l’intelligentsia occidentale acquise par principe aux bienfaits du socialisme rayonnant, les « Missionnaires » constataient cette propagande omniprésente en DDR, qu’elle soit le fait de « l’homo sovieticus ou de l’homo democraticus ».

 

Les « Missionnaires » en souriaient du moins pour ses résultats économiques ou écologiques, car il suffisait de traverser la zone industrielle de Halle ou le bassin minier de Cottbus pour avoir une idée de l’énormité de la pollution et de la vétusté de l’appareil industriel. Quant au panier de la ménagère, un petit tour au Konsum (Chaine du plus grand magasin est-allemand) ou aux économats soviétiques de Potsdam permettait de constater instantanément l’étendue et la profondeur du véritable gouffre qui les séparait des grandes surfaces  occidentales.

 

S’il est une chose sur laquelle les « Missionnaires » ne se faisaient aucune illusion, c’est bien la fraternité d’armes, sensée exister entre les Russes et les Allemands de l’Est, célébrée partout mais vérifiée nulle part, pour la bonne et simple raison qu’ils se tenaient bien à l’écart… 

 

Habitués à rompre le mur du secret et à franchir les obstacles de la propagande, pour ne pas parler des autres, les missionnaires n’ont eu aucune peine pour apercevoir et parfois même contempler, au bord des routes ou le long des rues, une multitude de panneaux, d’affiches, de pancartes ou de drapeaux célébrant les vertus du parti des travailleurs et des paysans, commémorant la victoire sur le fascisme, fustigeant les impérialistes,  applaudissant le socialisme, acclamant le marxisme-léninisme, ou condamnant l’OTAN et ses missiles de croisière.

 

Les terrains de manœuvre et les champs de tir n’étaient pas en reste. Tous les artifices de la propagande communiste y étaient allègrement exploités. Ecoles de patriotisme, les armées est-allemandes et soviétiques rivalisaient de slogans pour mener de pair l’instruction militaire et la formation idéologique.

 

Les idées abordées étaient particulièrement simples, l’efficacité étant avant tout recherchée dans la simplification abusive et l’affirmation catégorique. Le dogmatisme doctrinaire apportait ainsi les certitudes nécessaires pour rassurer le soldat ou le citoyen, qu’ils proviennent du Caucase ou de la Saxe.

 

Cette avalanche de panneaux visait à inculquer d’abord une définition nette des camps en présence : par définition, le capitalisme et le socialisme étaient inconciliables. Ce dernier était le camp du bien, celui-là le camp du mal. La propagande s’efforçait donc d’identifier le socialisme au progrès, au succès, à la paix et les héros-soldats, les ouvriers ou paysans ….au parti.

 

 Il s’agissait ensuite de cultiver la foi dans la victoire du socialisme en dénonçant constamment la nature agressive du capitalisme. On proclamait ainsi bien haut la théorie des guerres justes et injustes pour indiquer très clairement de quel côté était le bon droit et par conséquent où devait aller la victoire.

 

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(Walter Ulbricht. Premier secrétaire du 26 juillet 1953 au 3 mai 1971)      

 

 

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                (Erich Honecker, du 3 mai 1971au 18 octobre 1989)

 

 

 

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(Siège historique du Comité central et du Politburo à Berlin-Est)

 

 

Pour ancrer ce sentiment, la propagande dénonçait enfin le caractère anti-national des armées ou des entreprises capitalistes, les buts criminels que menaient leurs dirigeants, la nature dépravée et asociale de ses soldats et de ses ouvriers…

 

Le tout était enrobé de colombes (la Paix), de barbus (Marx, Engels et Lénine), d’ouvriers et de soldats casqués, de graphiques himalayens et de slogans illustrés et simplistes, de telle sorte que, même dépourvu de certificats de langue russe ou allemande, l’observateur de cette propagande finissait par comprendre… »

 

Si le rideau de fer n’a jamais été parfaitement étanche. Radios et télévisions occidentales parvenaient jusqu’aux oreilles et aux yeux des citoyens est-allemands, plus rarement les journaux. En revanche, les contacts humains étaient limités, si l’on excepte les commerçants de Berlin-Est et les guides touristiques, et toujours surveillés. Sur les routes, puis les autoroutes de transit, cette surveillance était étroite et les voitures occidentales en transit pour Berlin-Ouest ne pouvaient quitter l’autoroute pour les sentiers battus. De toute façon, le glaive et le bouclier du Parti – la redoutable Stasi – ainsi que la Police populaire – les Vopos omniprésents - contrôlaient étroitement et efficacement la moindre rencontre  entre des citoyens de camp opposé.

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Aujourd’hui, le dessin amuse, la phraséologie fait sourire, mais ce sont bien ces slogans qui ont conditionné toute une population, son armée et celle du « grand frère d’armes » pendant plusieurs dizaines d’années.

 

 

Quelques exemples :

 

Propagande idéologique omniprésente un calendrier mémorable : Cet extrait de l’agenda de poche de la NVA, édition de 1985, donne une bonne idée des fêtes et célébrations « souhaitables » !

 

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Et partout  … … .des panneaux ….  (Images prises par les missionnaires) :

 

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                   ...   puis en 1954 ….Staline disparu…..

 

 

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Quelques légendes :

Image au dessus -  Karl Marx : Prolétaires de tous les pays unissons-nous ; l‘enseignement de Karl Marx est tout puissant (Lénine) ; nous honorons Karl Marx en renforçant le socialisme et en renforçant la paix ; sous la bannière de Karl Marx poursuivons pour la paix et le socialisme ; le socialisme réel est la concrétisation des idées de Karl Marx.

 

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Image au dessus - Lénine : leurs idées notre programme ; l’étoile rouge marque l’image de notre temps ; amitié éternelle avec le pays de Lénine.

 

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    Les « Frères »…grand merci à eux…

 

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   La Guerre froide…et l’OTAN

 

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« Crions la paix contre les armes de l’Otan ; stoppons les déploiements de l’OTAN pour notre droit à la paix. »

 

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« Stop aux missiles US ;  pour une Europe sans armes nucléaires ; dans l’esprit de la déclaration de Prague : stop à l’impérialiste course aux armements, la confrontation politique de l’OTAN ne doit pas s’imposer. »

« Nous soutenons la proposition suédoise de créer une zone sans arme nucléaire en Europe »

 

 

Rappel personnel suite à cette dernière légende : « Clin d’œil de l’histoire, depuis le 7 mars 2024 la Suède est officiellement membre de l’OTAN ».

 

Commentaire personnel :

 

            Cette propagande permanente présente partout, des grandes villes au plus petit des villages, tant en bordure des autoroutes que des petites routes, tentait de démontrer sans cesse à  la population est-allemande les bienfaits du régime soi-disant pacifiste et « l’horreur » des régimes occidentaux va-t’en guerre.

            Mais c’est grâce à un soulèvement massif et pacifiste de sa population que la RDA disparaitra et que sa population viendra rejoindre celle du monde libre.

            Nous verrons dans l’épisode 2 d’autres aspects de cette propagande.



31/07/2024
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